CETTE TOUCHE THANATOLOGIQUE DE NOTRE DÉMOCRATIE!
Et si, ironiquement, nous disions qu’au Rwanda l’assassinat se classe en tête des performances « démocratiques »? Voilà depuis 52 ans, le mode de succession au pouvoir n’a pas évolué sous la République par rapport à la séculaire monarchie « nyiginya ». Il a même rétrogradé à en comparer la brutalité de nos jours avec le rite de suffocation, suivant le code ésotérique, des monarques devenus invalides.
Toute velléité d’accession au pouvoir se trouve sanctionnée par la mort pour les moins chanceux, la prison et l’exil pour les veinards. Le Rwanda est par excellence le pays de la répression et de l’intolérance quand vient la compétition pour le pouvoir. Ainsi, encore une fois, la mort était-elle au rendez-vous à un moment où l’ensemble de l’humanité essaye, à l’unisson, de faire abstraction des malheurs, moment où chez nous en particulier les gens sont plongés dans leurs fantasmes pacifistes et fraternistes du début de l’année.
L’opposant au régime actuel de Kigali, le colonel Patrick Karegeya, s’est fait tuer le 1erjanvier 2014 dans son asile d’Afrique du Sud. D’autres éminents politiciens, tels Théoneste Lizinde et Seth Sendashonga étaient aussi assassinés dans leur exil au Kenya en 1996 et 1998 respectivement. À l’intérieur du pays, une liste non exhaustive comprend des politiciens assassinés ou disparus à différentes dates dont notamment Évariste Burakari, Gratien Munyarubuga, Augustin Cyiza, Dr Léonard Hitimana, Assiel Kabera, André Kaggwa Rwisereka et une kyrielle d’officiers.
La triste réalité au paradoxe notoire, c’est qu’au Rwanda la « démocratie » a toujours été sous la tutelle des démocraties occidentales. Tous les régimes qui s’y sont succédé, depuis la mission civilisatrice des Belges aux années de la monarchie jusqu’aujourd’hui, ont eu leurs baby-sitters et non des moindres, car il s’agit des Français, des Anglais, des Canadiens et des Américains. Toutes ces puissances démocratiques ont fourni sans intervalle accompagnement et encadrement sur tous les plans, politique et spirituel singulièrement. Alors, une question fondamentale reste posée face à notre imbroglio révolutionnaire : quelle est la genèse de la faillite de la démocratie rwandaise ?
Certains pensent peut-être que le réflexe de tuer son adversaire politique s’inscrit dans la culture ancestrale, mais cela n’est pas exclusif au Rwandais. D’autres évidemment sont prompts à attribuer ce réflexe aux endémiques chicanes ethniques entre le Hutu et le Tutsi. Que nenni ! Les assassinats politiques sont communs entre Hutu autant qu’entre Tutsi. Il convient alors de regarder raisonnablement du côté d’un agent externe pour déceler qu’il y a eu un traitement avilissant du citoyen rwandais par l’impérialiste qui, contraint par la Déclaration universelle des droits de l’homme, lui a accordé une indépendance de façade.
La faillite de la démocratie au Rwanda est bel et bien la conséquence de la prise en otage du peuple par les suppôts ou les marionnettes de l’impérialiste, des mercenaires qui se moquent de l’instruction, soucieux de préserver en priorité les intérêts du maitre. Ce dernier est fournisseur d’armes par lesquelles le vassal doit se protéger contre son propre peuple, l’assujettir et le massacrer quand son emploi est menacé. Ainsi le maitre se réserve le pouvoir de décider quand mettre fin au règne et qui placer au trône. La finalité est bien résumée dans le titre et dans le contenu de Rwanda and the New Scramble for Africa : From Tragedy to Useful Imperial Fiction du journaliste et écrivain Robin Philipot. (Traduction libre : Le Rwanda et la Nouvelle ruée vers l’Afrique - De la Tragédie à l’utile Fiction impérialiste).La démocratie est sans conteste cette femme en détresse partout dans le monde, ainsi chaque nation doit-elle produire ses propres héros pour voler à la rescousse.
Le temps des impérialistes est révolu, la balle se trouve désormais dans le camp des intellectuels qui sont tenus de peser dans la balance face à la démocrature.