top of page

TWAGIRAMUNGU À LA DIFFICILE TÂCHE DE RACCOMMODER L'OPPOSITION RWANDAISE

À quand le débat à la hauteur des enjeux ?

Par Ismaïl Mbonigaba

Le président de la toute nouvelle Coalition de partis politiques rwandais pour le changement (CPC) opposée au régime de Kigali, Monsieur Faustin Twagiramungu, se heurte contre la rivalité de ses pairs qui l’accusent d’opportunisme et de ce qu’ils semblent qualifier de « concurrence déloyale » dans le jargon rwandais (Gutanguranwa Umushi).


Littéralement boudé par les dirigeants des autres partis ou coalitions de partis invités à prendre part à la création de la CPC, M. Twagiramungu dénonce une attitude égocentrique dans le chef de ces dirigeants qui ne cachent pas leurs ambitions d’être meneurs. Sans ouvertement les nommer au cours d’une longue entrevue avec l’animateur Serge Ndayizeye de Radio Itahuka, Faustin Twagiramungu a pointé du doigt messieurs Théogène Rudasingwa du RNC, Paul Rusesabagina du PDR et Nkiko Nsengimana des FDU qui font le malin et lui coupent l’herbe sous les pieds. L’enjeu étant les contacts et le soutien que chacun détient auprès de la communauté des décideurs internationaux.


Le président de la CPC invite des pairs à faire montre de sincérité et invite tous les acteurs politiques de l’opposition rwandaise à vaincre la peur, à s’exercer au débat d’idées et d’abandonner la misérable stratégie de calomnie.


Le niveau du débat politique rwandais reste bas


Ce papier s’inspire largement d’un article rédigé en 2012, alors que l’auteur en appelait à rehausser le débat politique rwandais au niveau supérieur. Deux ans plus tard, il est toujours à jour et on se rend compte que la situation va de mal en pis. Est-il possible de suivre une discussion politique entre Rwandais et aller jusqu’au bout sur un sujet donné sans y relever des futilités (terme amoindri) ? C’est triste qu’à l’ère des révolutions populaires de nature «numérique» les intellectuels d’un peuple se réduisent volontiers à des échanges stériles à longueur des journées. Les rôles se sont inversés, les vrais acteurs de politiques étant maintenant les menus peuples qui, au climax de leur indignation, s’érigent contre les dictatures, tandis que les «politiciens de carrière» niaisent carrément sur Internet. Une politique de bas étage.


Le virtuel technologique vient en effet d’avoir raison du pragmatisme élémentaire. Nous voici seulement derrière une meute de présidents et de coordonnateurs en mal de former équipes et surtout en mal d’inspiration, quant à l’idéologie qui les meut. La situation est grave, maladive même:

- Nous avons des candidats président de la République qui ne savent dire que «Kagame est mauvais», rien de plus. Ils ne savent pas bien expliquer ni pourquoi ni comment. Ils misent seulement sur l’impopularité du régime de Kigali et se livrent à un populisme le plus banal. Fantasmes et illusions dominent leur pensée. Le rêve, autant le leur que celui du Peuple, leur échappe.

- Nous en avons d’autres qui souffrent sérieusement de la mégalomanie. Tout ce qui se fait, c’est grâce à eux. Il n’y a personne d’autre qui a fait cela avant eux! En fait de véritables «Einsteins politiques», avec un discours honteusement creux qui va de balivernes entachées d’énormités au délire.

- Une autre catégorie de nos politiciens, c’est celle des muets. Ils ne veulent peut-être pas verser dans des cacophonies et polémiques stériles. Soit. Ce silence ressemble plutôt à «la politique de l’autruche» adoptée par certains pour se donner une marge de manœuvre, avec risque de se retrouver, le moment venu de sortir leur tête du sable, très loin en arrière et manquer le temps de se rattraper!


L’heure est au débat intelligent


La pratique de la politique à la rwandaise se résume, apparemment, à un jeu d’intelligence sans règlement ni conventions. L’idée de pouvoir primant sur celle de Nation, le manque de vision et l’opportunisme aveugle conduisent souvent aux alliances très à risque. Stratégie du plus malin. Au lieu de définir clairement leurs projets de société, nos politiciens versent dans la calomnie, le dénigrement, folie des grandeurs et jalousie. Il est temps qu’on se hisse à un autre niveau de discussion. Je cite Eleanor Roosevelt qui a un jour dit : «Les grands esprits parlent d'idées, les esprits moyens parlent des évènements, les esprits petits parlent des gens. »


« Bipolarisation » caduque et aliénante


Il est d’usage que quand on parle d’une organisation rwandaise, toutes catégories confondues (politique, civile ou commerciale etc), on s’attend à une caractérisation quasi instantanée alors qu’on en ignore même les tenants et les aboutissants : « Ah, ce sont des Tutsi! Bah, ce sont des Hutu! Peuh, des Twa! Attention, ces Banyenduga, ces Bakiga là… » uniquement parce qu’un membre identifié comme issu d’une telle ou telle autre ethnie, d’une telle ou telle autre région, se retrouve dans la direction de l’organisation. Méfiance au plus haut degré.

Ah, quels débats minables! La maturité est généralement à l’opposé de ce que l’on peut lire sur les fora rwandais. L’intolérance est d’autant forte qu’on a un jour vu les gens réputés Hutu ou Tutsi se dissocier même de leurs congénères, allant jusqu’à mettre en doute la «hutuité» ou la «tutsité» des intervenants, comme quoi ces derniers trahissent l’esprit du clan.

L’immaturité du débat rwandais est largement perçue dans le fond et dans la forme : des sujets assez cocasses, des approches et langages assez maladroits. Mais la chose la plus dangereuse, c’est la «mythification» dont certains veulent revêtir leurs idées. «Pas touche à mes idées, autrement vous êtes extrémistes»! Eh bien, le débat qui en vaut le nom se fait dans le respect mutuel, se fonde sur les faits et accepte la contradiction. S’imposer à tout prix, faire régner la pensée unique, finit toujours par ruiner celui qui le fait.


En quête du « leader »


Effectivement tout le monde a droit de dire et de faire ce que bon lui semble, quelque niais soit-il! Le problème serait de ce que personne ne parvienne à se démarquer de cette marmaille pour hisser le débat au dessus des passions ultra-égoïstes. Il nous faut un quelqu’un, noir ou blanc, jaune ou bleu, quelque soit son genre, féminin ou masculin, il nous faut quelqu’un. Ce personnage porte un nom : il est un leader. Il parle d’enjeux et non des individus. Il s’attaque aux problèmes et non aux méthodes de solution. Il prend des décisions éclairées et reste toujours cohérent avec lui-même. Il se sait sûrement bon mais ne se prétend jamais le meilleur. Et, en fin, il a la Nation à cœur et non ses intérêts personnels. Ainsi nous revient-il, à nous le peuple, de lui signifier ce qu’il nous parait. Le leader a une qualité : Il est visionnaire. Il écoute plus qu’il ne parle.

Chers compatriotes, je vous prie de me trouver un leader.


Ismaïl Mbonigaba

Pages Suivantes
Pages
 
  
Recent Posts
Recherche Par Tags
Pas encore de mots-clés.
bottom of page