Appel aux intellectuels rwandais

Par Victor Manege Gakoko

Mes chers compatriotes,

Si je me suis permis d'évaluer le bilan des 20 ans passés et brosser les défis à venir, c'est aussi une simulation que je voulais faire pour amorcer les débats de fond respectueux qui manquent tant chez les intellectuels et intellectuelles rwandais citoyens. Ce que je n'ai pas dit parce ce que je m'attendais plutôt à une telle question c'est que le développement social des Rwandais s'opère à deux vitesses c'est-à-dire de façon asymétrique. Je crois que ce constat donne matière à réflexion.

Dans un autre cas, nous sommes indignés de constater que la polarisation de la classe politique rwandaise a provoqué l'inhibition de l'action intellectuelle citoyenne ne favorisant ni l'initiative ni l'innovation. Les intellectuels rwandais sont à perte de vitesse et ne sont devenus que de simples spectateurs stériles alors qu'ils devraient au contraire s'inscrire dans la lignée du génie citoyen des grands penseurs de Nyakibanda et défenseurs des valeurs républicaines dont les majeures sont : LIBERTÉ ET ÉGALITÉ.

Sinon ma conviction personnelle est que le Rwanda doit désormais se gouverner au centre; c'est une réalité objective. C'est pourquoi je préconise d'abord le changement du paradigme rwandais sans quoi l'avenir risque de redevenir sombre malgré le bilan global positif évoqué. Encore une fois, il ne s'agit pas de s'en prendre à tel ou tel régime mais plutôt à se questionner sérieusement sur la mentalité rwandaise qui a des tares socioculturelles évidentes. Nous ne pouvons pas continuer à pratiquer la politique d'autruche: chanter et vanter abusivement notre culture sachant pertinemment que dans certains de ses circuits elle véhicule des produits de comportement nocif tels que le mensonge, la jalousie, la dissimulation, la compromission, la traîtrise, la sorcellerie,... Ce sont ces circuits qui donnent du fil à retordre aux Rwandais quand ils sont utilisés sciemment par certains politiciens pour défendre leurs intérêts égoïstes.

En effet, il n'est secret pour personne que la classe politique rwandaise souffre d'une crise de moralité et d'intégrité qui plonge tous les Rwandais dans le désarroi le plus total. Aujourd'hui la majorité des Rwandais pense que l'objectif principal du politicien est d'arriver au pouvoir par la violence et d'amasser les richesses de façon illicite. Ainsi spéculer sur les faits historiques est devenu une façon de rehausser les sentiments hégémoniques ancrés dans une poignée d'opportunistes au pouvoir ou aspirant à le détenir. Attention le Rwandais cache toujours sa frustration mais sache l'éviter quand sa colère gronde!

D'après moi, nous devons commencer à prendre conscience de cette menace sociale potentielle pour pouvoir casser définitivement le cercle vicieux de l'amalgame hutu-tutsi, cette arme redoutable utilisée systématiquement par les opportunistes dans la bataille politique rwandaise.

Pourtant les vrais enjeux sont complètement ailleurs et concernent beaucoup plus le choix du système politique et économique qui conviendrait mieux aux Rwandais du XXIème et aux futures générations dans le contexte post-génocide. Plus précisément il s'agit de réfléchir si le choix du système économique apparenté au social-libéralisme appliqué par le gouvernement actuel ne risque pas d'accroitre à moyen terme et long terme les inégalités sociales. Autrement dit, posons-nous la question si franchement nous ne sommes pas en train de fabriquer une bombe sociale à retardement et partant préparer lentement mais sûrement une deuxième révolution sociale (!?).

C'EST NOTRE DEVOIR D'INTELLECTUEL CITOYEN D'AGIR POUR PRÉVENIR ET DE PRÉVENIR POUR AGIR!