Bombe à retardement : Les tabous sur le génocide rwandais ménacent sérieusement la Nation
Par Victor Manege Gakoko
CE QUE J'EN PENSE :
Je ne sais par où commencer étant donné l'actualité qui domine l'info et qui risque d'accaparer nos débats au détriment des réflexions en profondeur. Sans passer par quatre chemins, il faut reconnaître que le génocide "rwandais" porte en lui des pages et zones sombres que personne ni même les historiens ne parviendront jamais à cerner et circonscrire dans la réalité historique. Chaque rwandais ayant vécu cette tragédie conserve une partie infime soit-elle de la vérité matérielle - ce qu'il a vu, entendu ou fait -. Compiler toutes ces parties en une seule histoire - l'histoire du génocide rwandais - est quasiment impossible surtout qu'après 20 ans les mémoires perdent parfois leur fiabilité pour ne pas dire leur fidélité. J'en reviens donc aux polémiques qui normalement devraient servir de piste pour faire comprendre aux uns comme aux autres que tant qu'on ne dépassionera pas les débats toutes les versions resteront tendancieuses. Ça c'est le premier point. Le deuxième point est l'absence d'objectivité primaire dans les analyses que les politiques tentent de faire ou d'imposer selon le cas. D'abord un crime ne nie pas un autre tout comme un crime n'absoud pas un autre. Or seuls les Rwandais connaissent parfaitement qu'ils sont les seuls responsables de leur drame. Se cacher derrière la communauté internationale quelles que soient les raisons et les intérêts sous-jacents complique davantage l'histoire du génocide "rwandais". D'où la partisannerie qui dénature la réalité des faits et trahit sciemment la vérité. Nous sommes donc en face de diverses catégories d'interprétations historiques sur trame des jeux politiques et idéologiques. Et cette soupe rwando-rwandaise de goût très amer donne ce tableau. 1) Ceux qui connaissent la vérité et ne veulent pas en parler pour x, y raisons. 2) Ceux qui connaissent la vérité, ont tout intérêt à ce qu'elle ne se sache pas et font tout pour qu'elle ne se sache pas. 3) Ceux qui connaissent ou cherchent à connaitre la vérité et commencent à en parler ouvertement. 4) Ceux qui ignorent tout et dans le fanatisme idéologique et/ou ethnique prennent partie à tort et à travers. Et 5) ceux qui ignorent tout et préfèrent ne pas prendre part à la mêlée. La 6ième catégorie transversale provient des familles mixtes "rwandaises-étrangers" qu'on retrouve pratiquement dans la classification grossière des 5 premières mais qui est beaucoup plus active dans la catégorie 2. Tout ce cocktail fait que les bruits cachent la musique de fond qui chante constamment que les Rwandais (sans exception) à un moment de l'Histoire sont (re)devenus des sauvages; s'entre-tuer et le nier est encore pire que la sauvagerie elle-même. J'en viens au troisième point. La pure spéculation sur la terminologie ou les définitions réservées au domaine du droit en général et du droit international en particulier. Sans même utiliser le terme "génocide", aucun rwandais ne peut nier que les différents crimes commis vers la fin du XXe siécle (et même maintenant à bien d'égard) dans la région des grands lacs dépassent de loin la notion de "génocide" telle qu'elle est définie par le conseil de sécurité de l'ONU. Il faudrait plutôt inventer un nouveau mot et le faire accepter dans le domaine du droit international. Ceci revient à dire que vouloir expliquer d'une façon ou d'une autre la tragédie rwandaise à travers les seuls mécanismes du droit serait de l'ignorance scientifique. Car les sciences sociales dites molles ont cette lacune ou ce défaut qu'elles ne sont pas exactes et qu'elles n'évoluent pas aussi vite que les sciences dures. Autrement dit en droit, si je ne m'abuse, une définition peut changer, être complétée ou nuancée suivant la recherche ou les faits nouveaux. Sur ce point, nous constatons qu'il y a des Rwandais et même des étrangers qui veulent expliquer ou omettre certains crimes commis au Rwanda de même importance sinon plus graves à travers un simple raisonnement linéiaire de cause à effet alors qu'une approche systémique serait plus appropriée, celle qui permet de comprendre qu'une cause peut être le résultat d'un effet et vice-versa. Et effectivement c'est comme ça que ça s'est passé au Rwanda et c'est pourquoi d'après moi il peut y avoir un crime de génocide sans nécessairenent planification mais plutôt issu d'une succession de la complexité de multiples causes - effets - causes - effets.